May 30, 2016
Un mois à réapprendre la lenteur
Voilà un mois que nous avons pris la mer. Il a fallu tout d’abord s’habituer à cet environnement urbanisé que nous avions un moment délaissé. Mais c’est surtout reprendre le rythme d’un mode de vie. Contrairement à nos métiers et à notre vie moderne, il faut accepter la lenteur, ne plus avoir la maîtrise sur tout.
La navigation en kayak à ses limites et nous avons les nôtres. Face à l’adversité des éléments, il ne faut pas hésiter à temporiser, courber l’échine afin de mieux repartir. Lorsqu’une forte dépression est annoncée, avant que la mer se fasse blanche, la situation est évidente, il faut se poser, attendre et patienter.
Mais que faire lorsque les choses ne sont pas aussi marquées ?
Que le vent est juste un peu trop fort, dans la mauvaise direction ?
Que le coup de vent est finissant, mais que la mer reste encore agitée ?
Qu’il se renforce bien au-delà des prévisions et que les quatre-vingts kilos que nous tractons à bout de bras se font plus pesants ?
Lorsque l’on sait avec quelle rapidité la mer Méditerranée se creuse, on se doit de rester sur le qui-vive.
La situation va-t-elle se stabiliser ou se dégrader ?
Aux abords des infrastructures portuaires, notre route coupe celle de cargos et ferrys qui transportent marchandises attendues et gens pressés.
Ce monde n’est plus le nôtre.
Voilà notre quotidien ! Il est fait de journées, où l’on ne peut que patienter où l’on n’a plus prise sur le temps qui passe, où l’on devient spectateur du lieu dans lequel on se pose.
On lie des amitiés, on prend des habitudes, on apprécie une douche, une table, le confort, alors qu’on vient à peine de le quitter.
La densité de la Ligure nous a surpris, les espaces sauvages de la Toscane nous ont enchantés.
Les rencontres sont furtives, mais elles sont avant tout sincères.
Ici, un café et un petit déjeuner offert, là une soirée autour d’une table entre amis. On vous ouvre les portes, on vous laisse les clefs.
Les gens vous saluent : « c’est bien ce que vous faites ! J’ai vu votre site » (www.the-route.com apparaît sur les kayaks) une fois encore, ce sont les rencontres qui font le voyage.
Avec cela, il faut trier les photos, poser un texte sur le papier, mettre le site à jour. Tout cela dans des conditions pas forcément évidentes, le sable, le vent, la réverbération du soleil sur l’écran du Mac.
Si nous arrivons à travailler lors de nos phases d’arrêt prolongé, cela est impossible après une longue journée de navigation. Le soir, allongés dans nos duvets, nous avons du mal à lire deux pages sur le Kindle.
La lecture tient une place importante dans notre itinérance. Il y a notre aventure, mais celle des autres nous inspire et nous a toujours fait toujours rêver.
Merci, Nathalie Courtet, je viens de terminer « 71 & autres faits d’hiver ». J’ai adoré!
Mais il y a surtout l’impératif ; arriver à Athènes au plus tard sur le mois d’octobre. Cela nous impose un rythme de 500 à 600 km par mois.
Faisable ! Nous avons couvert 505 km ce premier mois. Tout dépend des conditions, la nôtre, mais surtout celle de la Météo.
On rêve d’avoir autant de vent arrière que nous avons eu de vent debout ce mois-ci.
Apprécier oui, mais sans trop s’attarder. Là est toute la difficulté.
La navigation est de loin bien plus complexe qu’en mer de Baffin, imprécise et changeante. Et les compétences de Michel – Searout, notre routeur météo, ne peuvent rien y changer.
Le printemps y est pour quelque chose, mais l´on sait aussi que le climat perd la boule.
Pourquoi cet impératif me diriez-vous ? Une fois encore, c’est les saisons qui rythment le bal. Nous avons besoin du dernier trimestre pour traverser la Turquie, avec l’espoir de vivre un Noël orthodoxe en Géorgie, début janvier, comme nous aimerions passer trois mois en Iran et le quitter après le Nouvel An iranien début avril avant que les sommets enneigés de la Route du Pamir nous ouvrent les portes. Mais on sait aussi que l’aventure ne peut s’écrire au futur.
Civitavecchia – Italie
A.A.